Toutes actions ou omissions déloyales d’un professionnel à destination d’un consommateur qui visent à altérer sa prise de décision commerciale constituent une pratique commerciale déloyale.
Les pratiques commerciales déloyales sont interdites.
L’interdiction de ces pratiques visent à protéger les consommateurs et ne doit pas être confondus avec la concurrence déloyale qui sanctionne l’abus du comportement des opérateurs économiques entre eux (dénigrement, désorganisation ou parasitisme).
Si la concurrence déloyale ne fait pas l’objet de dispositions particulières, les pratiques commerciales déloyales sont encadrées par les articles L.121-1 et suivants du code de la consommation issu de la transposition de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005.
L’interdiction de ces pratiques constitue un principe général composé de deux catégories plus spécifiques que sont les pratiques commerciales trompeuses (art.L.121-2 C. conso) et les pratiques commerciales agressives (art. L.121-7 C. conso).
Définition
Une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service. (art.121-1 C. conso).
Dès lors, une pratique commerciale sera considérée comme déloyale si elle remplit deux critères :
- La contrariété à la diligence professionnelle ;
- L’altération substantielle du comportement économique du consommateur moyen.
La contrariété aux exigences de la « diligence professionnelle » et « l’altération du comportement du consommateur », ne sont pas définit par la loi mais par l’article 2 de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005.
Critères d’application
Deux critères doivent être réunis, un manquement du professionnel à la diligence attendue (1) qui a des effets sur le comportement du consommateur (2).
Une pratique contraire à la diligence professionnelle
Conformément à l’article 2 de la directive 2005/29/CE, la diligence professionnelle est « le niveau de compétence spécialisée et de soins dont le professionnel est raisonnablement censé faire preuve vis-à-vis du consommateur, conformément aux pratiques de marché honnêtes et/ou au principe général de bonne foi dans son domaine d’activité ».
La diligence attendue du professionnel s’apprécie notamment au regard des usages de la profession sur un type de marché défini et des attentes légitimes du consommateur.
Les codes de déontologies et les codes de conduite professionnelle doivent être pris en compte pour apprécier la diligence professionnelle (directive 2005/29/CE cons.20).
Le juge devra apprécier le manquement au diligence professionnelle compte tenu d’un ensemble de pratique dans un secteur déterminé et au regard d’une part importante des consommateurs.
La jurisprudence relative à la vente d’ordinateurs prééquipés de logiciels illustre la difficulté d’apprécier ces éléments et de caractériser le manquement du professionnel. Que ce soit sur l’obligation d’information du consommateur sur le logiciel (Cour de cass. 6 octobre 2011, nº 10-10.800) ou sur le refus de remboursement du cout du logiciel (CJUE Deroo-Blanquart 7 sept.2016 aff. C-310/15).
Altération du comportement du consommateur
Conformément à l’article 2 de la directive 2005/29/CE, l’Altération substantielle du comportement économique du consommateur est « utilisation d’une pratique commerciale compromettant sensiblement l’aptitude du consommateur à prendre une décision en connaissance de cause et l’amenant par conséquent à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement ».
Un parallèle peut être fait avec le vice du consentement sur l’erreur ou le dol. C’est-à-dire que la pratique doit induire le consommateur à prendre une décision qu’il n’aurait pas pris autrement.
Toutefois, cette altération s’apprécie au regard d’un consommateur moyen sans avoir égard aux qualités propres du consommateur Cass. 1re civ., 22 janv. 2014, no 12-20.982).
La directive 2005/29/CE apporte quelques précisions concernant la notion de consommateur moyen (considérant 18) : « (…) la présente directive prend comme critère d’évaluation le consommateur moyen qui est normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, compte tenu des facteurs sociaux, culturels et linguistiques, (…).
L’effet sur le consommateur moyen s’interprète de manière identique pour les trois cas de déloyauté, qu’elle soit générale, trompeuse ou agressive.
Il est à préciser que la notion de consommateur moyen s’appréciera différemment à l’égard des catégories de personnes vulnérables.
Dans ce cas, le caractère déloyal d’une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs vulnérables en raison d’une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s’apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe. (art. L. 121-1 al.3 C. conso).
Régime de la pratique commerciale déloyale
Le code de la consommation énumère une liste de pratiques réputées comme déloyales. Il s’agit des pratiques commerciales trompeuses (art. L.121-4 et L.121-15 C. conso) et des pratiques commerciales agressives (art. L.121-7 C. conso).
Dans ce cas, le seul fait d’effectuer une pratique interdite énumérées par ces articles suffit à caractériser la déloyauté et à en sanctionner l’auteur. La pratique est présumée déloyale de manière irréfragable, sans que le professionnel puisse apporter la preuve de sa loyauté (Cass. crim, 28 janv. 2020, n°19-80.496).
Il s’agit de pouvoir sanctionner automatiquement l’auteur d’un pratique au titre des pratiques strictement énumérés (trompeuses ou agressives). A défaut, il faudra remplir les critères généraux ou spécifiques prévues par ces pratiques.
En effet, si la pratique n’est pas énumérée par ces articles, deux possibilités :
Soit, la victime démontre le caractère « trompeur » ou « agressif » de la pratique conformément aux critères prévus respectivement aux articles L.121-2 et L.121-6 du code de la consommation.
Soit, à défaut de remplir les critères « spécifique » de la pratique trompeuse ou agressive, la victime devra démontrer le caractère déloyal de la pratique conformément aux critères « généraux » posés par l’article L. 121- du code de la consommation.
Concernant les sanctions, aucun texte ne prévoit expressément de peine en cas de pratique commerciale déloyale « générale » prévue par l’article L. 121-1 C. conso. Il faudra donc engager une action de droit commun au titre de la responsabilité civile.
A contrario, les pratiques commerciales déloyales spécifiques « trompeuse et agressives » font l’objet de texte spéciaux. Dans ce cas, les sanctions pourront être administratives ou pénales.
- En cas de contrôle de la DGCCRF, la pratique déloyale pourra être sanctionnée de manière administrative par une amende de 3 000 euros ou 15 000 pour une personne morale. Ces amendes ne pourront être infligées qu’en cas de pratique commercial trompeuse ou agressives (L.531-1 2° C. conso).
- De même ces pratiques pourront également être sanctionnés au titre du délit de tromperie dont les auteurs encourent une peine d’emprisonnement de deux ans et 300 000 euros et éventuellement à 10 % du chiffre d’affaires (art. L.132-11 et L.132-12 C. conso).
Enfin, les contrats conclus dans le cadre d’une pratique commerciale agressives encourent la nullité. En effet, « le contrat conclu à la suite d’une pratique commerciale agressive mentionnée aux articles L. 121-6 et L. 121-7 est nul et de nul effet » (art. L. 132-10 C. conso). Il en sera de même du contrat conclu dans le cadre de la pratique illicite de l’article L.121-12 du code de la consommation (art. L. 132-16 C. conso).
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