La falsification d’un chèque résulte d’une altération matérielle postérieure à son émission. Dans ce cas, l’émetteur du chèque pourra subir un préjudice en cas d’encaissement du chèque falsifié.
En principe, l’encaissement d’un chèque falsifié pourra engager la responsabilité du banquier. En effet, celui-ci est en principe tenu à un devoir de vigilance lors de l’encaissement d’un chèque.
Ainsi, lors de la présentation d’un chèque le banquier tiré est tenu de vérifier la régularité formelle du chèque. A défaut, il engage sa responsabilité s’il ne détecte pas les anomalies apparentes (Cass. com., 17 sept. 2013, n°12-18.202). Si l’anomalie n’est pas apparente, le banquier ne saurait voir sa responsabilité engagée (Cass. com., 17 juin 2020, n°18-18.629).
Les anomalies apparentes peuvent résulter d’un grattage, rature ou modification du nom du bénéficiaire. Mais aussi, en cas de montant excessivement anormal du chèque (aucune autorisation de découvert de sorte que la banque aurait dû refuser le paiement de ce chèque entraînant un solde débiteur important – Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 4 mars 2008, 06-14.409).
Ainsi, l’émetteur du chèque pourra engager la responsabilité du banquier pour avoir encaissé un chèque falsifié. Pour cela, il appartient à l’émetteur du chèque de prouver que l’anomalie était apparente (Cass. com., 6 janv. 2021, n°19-10.753). Il revient au juge d’apprécier matériellement l’anomalie, c’est-à-dire vérifier que l’état du chèque aurait dû attirer la vigilance du banquier.
Dès lors, le client devra réclamer le chèque et le produire en justice. Toutefois, le problème peut se poser lorsque la banque tirée à détruit le chèque.
L’arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 9 novembre 2022, n° 20-20.031, vient répondre à cette question.
Sur les faits : La modification du nom du bénéficiaire du chèque
En l’espèce, une société avait émis un chèque dont le nom du bénéficiaire avait été modifié. Celle-ci, engageait la responsabilité de sa banque pour avoir encaissé le chèque sans avoir déceler l’anomalie liée à la modification du nom du bénéficiaire.
La banque avait détruit le chèque et ne produisait qu’une copie en noir et blanc du chèque falsifié qui ne permettait pas de détecter l’anomalie apparente.
La cour d’appel condamna la banque en considérant que cette photocopie ne permettait pas de constater l’absence d’anomalie matérielle. Autrement, dit la cour d’appel présumait du caractère anormal du chèque étant donné que la banque ne pouvait pas produire le chèque.
Ainsi, en réclamant à la banque de démontrer que le chèque n’était pas affecté d’une anomalie, la cour d’appel renverser la charge de la preuve qui incombe en principe à l’émetteur du chèque.
Charge de la preuve d’un chèque falsifié
La Cour de cassation vient confirmer la position de la Cour d’appel. Celle-ci considère que :
Il résulte de la combinaison des articles 9 du code de procédure civile et 1315, alinéa 2, devenu 1353, alinéa 2, du code civil que s’il incombe à l’émetteur d’un chèque d’établir que celui-ci a été falsifié, il revient à la banque tirée, dont la responsabilité est recherchée pour avoir manqué à son obligation de vigilance et qui ne peut représenter l’original de ce chèque, de prouver que celui-ci n’était pas affecté d’une anomalie apparente, à moins que le chèque n’ait été restitué au tireur.
Dès lors, le chèque sera présumé contenir une anomalie apparente si la banque ne produit pas le chèque original.
Le cas contraire aurait été surprenant. En effet, l’émetteur du chèque ne peut démontrer l’anomalie en l’absence de chèque qu’il n’a pas en sa possession. De plus, il suffirait que la banque invoque, à chaque fois, avoir détruit le chèque pour s’exonérer de sa responsabilité. Cette position ne pouvait être retenue, l’émetteur du chèque ne pouvant être privé d’un recours contre sa banque en cas de chèque falsifié.
Ainsi, un chèque sera présumé falsifié si la banque de démontrer pas le contraire. Surprenant, mais justifié.
Le cabinet vous assiste et vous conseil en cas de contentieux liés à la falsification d’un chèque.