Le droit d’auteur est un ensemble de droits exclusifs accordés par la loi aux créateurs d’œuvres de l’esprit. Ces droits couvrent les créations littéraires, artistiques, musicales, audiovisuelles, ainsi que d’autres formes d’expressions créatives. En France, le droit d’auteur est régi par le Code de la propriété intellectuelle (CPI).
Ce droit confère à l’auteur des droits moraux et patrimoniaux.
Cet article définit le droit d’auteur, explore ses prérogatives et ses mécanismes de protection, et examine les cadres législatifs et jurisprudentiels qui régissent ce domaine.
Qu’est-ce que le droit d’auteur ?
Le droit d’auteur protège les œuvres de l’esprit quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination. Pour bénéficier de cette protection, une œuvre doit satisfaire à une condition essentielle : l’originalité.
En droit français, l’originalité est définie traditionnellement comme l’empreinte de la personnalité de l’auteur. Cette notion, bien que fondamentale, reste difficile à cerner et est souvent sujet à interprétation. La jurisprudence française a érigé l’originalité en critère indispensable pour toutes les œuvres de l’esprit, (article L. 112-4 du Code de la propriété intellectuelle).
Le droit d’auteur s’applique dès la création de l’œuvre, sans formalité nécessaire : « L’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. » art. L111-1 CPC.
Si l’œuvre est reconnue comme originale, l’auteur pourra bénéficier d’une protection au titre de ses droits moraux et droits patrimoniaux.
Droits moraux
Les droits moraux sont perpétuels, inaliénables et imprescriptibles. Il garantissent à l’auteur le respect de son nom, de sa qualité et de son œuvre. Ces droits sont transmissibles aux héritiers de l’auteur. Ils confèrent à l’auteur :
- Le droit de paternité : L’auteur a le droit de revendiquer la paternité de son œuvre, c’est-à-dire de se faire reconnaître comme étant le créateur.
- Le droit au respect de l’œuvre : L’auteur peut s’opposer à toute modification, déformation ou mutilation de son œuvre qui porterait atteinte à son honneur ou à sa réputation.
- Le droit de divulgation : L’auteur décide du moment et des conditions de communication de son œuvre au public.
- Le droit de retrait et de repentir : L’auteur peut retirer son œuvre du commerce ou en modifier certaines parties, sous certaines conditions.
Droits patrimoniaux
Les droits patrimoniaux confèrent à l’auteur le monopole de l’exploitation économique de son œuvre pour une durée limitée. Ces droits incluent :
- Le droit de reproduction : L’auteur a le droit d’autoriser ou d’interdire la reproduction de son œuvre sous diverses formes (impression, enregistrement, etc.).
- Le droit de représentation : L’auteur peut autoriser ou interdire la communication de son œuvre au public, par exemple à travers des spectacles, des diffusions ou des expositions.
- Le droit de suite : Ce droit permet à l’auteur ou à ses héritiers de percevoir un pourcentage sur les ventes successives de l’œuvre d’art originale.
Attention, le monopole d’exploitation est limité par certaines exceptions, telles que la copie privée, la citation courte, et la revue de presse. Comme indiqué, les droits patrimoniaux sont limités dans le temps et perdurent pendant soixante-dix ans après le décès de l’auteur. Ensuite, l’œuvres tombe dans le domaine public et il sera possible de l’exploiter à des fins commerciales.
Quelle œuvre protégeable ?
Le Code de la propriété intellectuelle, dans son article L. 112-2, dresse une liste non exhaustive des catégories d’œuvres de l’esprit pouvant être protégées par le droit d’auteur. Voici les principales catégories d’œuvres susceptibles de bénéficier de cette protection :
Œuvres littéraires : (Livres ; Brochures ; Conférences, allocutions, sermons et autres œuvres de même nature). Œuvres musicales (Compositions musicales avec ou sans paroles). Œuvres graphiques et plastiques (Dessins, peintures ; de sculpture, de gravure, de lithographie ; Œuvres graphiques et typographiques).
Œuvres photographiques et Œuvres audiovisuelles (Cinématographiques ; Télévisuelles ; Vidéographiques). Œuvres dramatiques (Dramatiques ou dramatico-musicales ; Chorégraphies, numéros et tours de cirque, pantomimes, mises en scène).
Œuvres d’art appliqué ; Créations des industries saisonnières de l’habillement et de la parure ; Œuvres d’architecture ; Œuvres de logiciels (programmes d’ordinateur, incluant le matériel de conception préparatoire) ; Œuvres des arts appliqués ; Plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l’architecture et aux sciences ; Œuvres de l’art dramatique et chorégraphique (Chorégraphies, numéros et tours de cirque, pantomimes ; Mises en scène) ; Œuvres de design (Créations ayant un caractère ornemental ou esthétique).
Le droit d’auteur protège toutes formes de créations matérialisées sur un support. Dès lors, pour être protégée, une œuvre doit être originale, c’est-à-dire refléter l’empreinte de la personnalité de l’auteur, et doit être formalisée concrètement (prendre forme dans le réel).
Quels sont les titulaires des droits d’auteur ?
Personnes physiques et morales
En France, le droit d’auteur naît en principe au profit de l’auteur, c’est à dire une personne physique.
Les personnes morales (sociétés, associations) ne peuvent être titulaires initiaux du droit d’auteur, sauf dans le cas des œuvres collectives créées sous leur direction et à leur initiative. En effet, La Cour de cassation a clairement énoncé que les personnes morales ne peuvent être titulaires initiaux du droit d’auteur, sauf dans le cas des œuvres collectives (Cass. 1re civ. 15 janv. 2015, n° 13-23.566). Sur ce point voir également l’article L.113-2 du CPI.
Enfin, l’article L. 113-1 dispose que : « la qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l’œuvre est divulguée ». Il s’agit d’une simple présomption.
Œuvres créées en exécution d’un contrat
Contrat de travail
Les œuvres créées par un salarié en exécution de son contrat de travail sont la propriété de l’auteur, c’est-à-dire le salarié, même si l’œuvre a été créée suivant les instructions de l’employeur (CPI, art. L. 111-1 al. 1). Une cession expresse des droits est nécessaire pour que l’employeur devienne cessionnaire (CPI, art. L. 131-3). Cependant, pour les logiciels, une présomption légale de cession au profit de l’employeur existe (CPI, art. L. 113-9).
Il en sera de même lors d’un contrat de commande, en l’absence de lien salariale. Le CPI dispose qu’un contrat n’emporte aucune dérogation à la jouissance des droits d’auteur (CPI, art. L. 111-1 al. 3).
Œuvres collectives et collaboratives
Les œuvres collectives sont créées à l’initiative et sous la direction d’une personne morale, laquelle est titulaire des droits sur l’œuvre entière sans que les contributions individuelles puissent être distinguées (CPI, art. L. 113-2). Cette personne est investie des droits de l’auteur sur l’ensemble de l’œuvre (CPI, art. L. 113-5).
Les œuvres de collaboration impliquent plusieurs auteurs, chacun ayant des droits sur l’œuvre finale. Le CPI dispose que l’œuvre de collaboration est la propriété commune des coauteurs, qui doivent exercer leurs droits d’un commun accord (CPI, art. L. 113-3).
Œuvres dérivées et composites
Les œuvres dérivées, incorporant des éléments d’œuvres préexistantes sans la collaboration de leur auteur, confèrent des droits à leur auteur sous réserve des droits de l’auteur de l’œuvre originale (CPI, art. L. 113-4). Ce cadre assure le respect des contributions initiales tout en permettant la création de nouvelles œuvres.
Comment protéger son œuvre ?
Prouver la paternité et la date de création
En France, la protection du droit d’auteur est automatique dès que l’œuvre est créée et formalisée, qu’elle soit achevée ou non. Aucune formalité administrative n’est requise pour bénéficier de la protection du droit d’auteur.
Toutefois, il est essentiel de pouvoir prouver que vous êtes l’auteur de l’œuvre et de démontrer la date de sa création en cas de litige. Voici quelques méthodes recommandées :
- Dépôt de l’œuvre auprès d’un tiers reconnu : Déposer une copie de votre œuvre auprès d’un notaire, d’un huissier de justice, ou d’une société de gestion collective (comme la SACEM pour les œuvres musicales) peut constituer une preuve solide de votre paternité et de la date de création. Il est également possible d’utiliser des services en ligne spécialisés dans la protection des œuvres qui offrent des solutions de dépôt numérique avec horodatage, et sont des solutions efficaces.
- Envoi recommandé à soi-même : Envoyer une copie de votre œuvre à vous-même par courrier recommandé avec accusé de réception et ne pas ouvrir l’enveloppe. Le cachet de la poste fera foi de la date de création.
- Enregistrement auprès de l’INPI : Bien que non obligatoire, vous pouvez choisir d’enregistrer votre œuvre auprès de l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) pour certaines catégories d’œuvres (comme les logiciels) ou en utilisant l’enveloppe SOLEAU. Cet enregistrement peut faciliter la preuve de la paternité et de la date de création.
- Utilisation des mesures techniques de protection (DRM) : Pour les œuvres numériques, les mesures techniques de protection (Digital Rights Management – DRM) peuvent contrôler et restreindre l’utilisation non autorisée de votre œuvre. Ces mesures incluent le chiffrement, les protections contre la copie et l’accès restreint aux fichiers numériques.
Procédures et sanctions
Compétence exclusive de certains tribunaux
La loi du 29 octobre 2007 a attribué la compétence exclusive pour les litiges relatifs aux droits de propriété intellectuelle à certains tribunaux judiciaires spécialisés. Cette compétence exclusive s’applique également lorsqu’il y a une question connexe de concurrence déloyale (CPI, art. L. 331-1). Les juridictions compétentes sont listées par décret (décret n° 2009-1205 du 9 octobre 2009).
Action en contrefaçon
Si vous constatez une violation de vos droits, vous pouvez engager une action en contrefaçon devant les tribunaux compétents. Les sanctions pour contrefaçon peuvent inclure des dommages-intérêts, des injonctions pour faire cesser les actes illicites, et des peines pénales.
Référés et saisies-contrefaçon
Le juge des référés, compétent pour traiter les situations d’urgence, peut ordonner des mesures provisoires pour protéger les droits d’auteur, notamment la saisie-contrefaçon (CPI, art. L. 331-1). Cette procédure permet au titulaire de droits d’obtenir rapidement la preuve d’une contrefaçon et de faire cesser immédiatement les actes illicites.
Recours à l’ARCOM
Pour les infractions en ligne, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) peut intervenir pour envoyer des avertissements aux contrevenants et initier des actions judiciaires si nécessaire. Elle veille également à la conciliation entre les titulaires de droits et les utilisateurs en cas de différend sur l’application des exceptions au droit d’auteur (CPI, art. L. 331-33).