L’hypothèque conventionnelle, également désignée « contrat d’hypothèque » est une garantie souvent utilisée dans le cadre des opérations de financement des biens immobiliers. Sa mise en œuvre permet d’assurer le remboursement d’une créance en cas de défaillance débiteur. Cet article expose les conditions de validité et les modalités d’exécution de l’hypothèque.
Définition
L’hypothèque conventionnelle est une sûreté réelle immobilière résultant d’un contrat entre un créancier (le bénéficiaire) et un constituant (souvent le débiteur ou un tiers). Selon l’article 2411 du Code civil, elle permet de garantir une dette à l’aide d’un bien immobilier, le constituant devant être titulaire du droit hypothéqué.
Conditions de validité de l’hypothèque
Pour être valable, l’hypothèque doit remplir plusieurs conditions :
Sur le fond : consentement et pouvoirs du constituant
Le constituant doit avoir la capacité juridique de disposer du bien immobilier (art. 2410 C ; civ). Cela inclut le respect des règles de droit des incapacités, l’obtention d’autorisations nécessaires (conseil de famille, juge des tutelles, etc.), et, dans le cadre des régimes matrimoniaux, le consentement des deux époux pour hypothéquer le logement familial ou un bien commun. Par exemple, un époux marié sous un régime de communauté doit obtenir le consentement de son conjoint (C. civ. art. 1424).
Enfin, le consentement doit être délivré devant notaire.
Sur la forme : acte notarié
Le contrat d’hypothèque doit obligatoirement être notarié, sous peine de nullité, comme l’exige l’article 2409 du Code civil. Cette exigence vise à garantir la sécurité juridique de l’acte et à protéger les parties. Le notaire a l’obligation de vérifier la capacité et les droits du constituant sur le bien, et de s’assurer que le consentement est donné de manière éclairée.
De plus, conformément au principe de spécificité, chaque bien hypothéqué doit être décrit avec précision, et les créances doivent être déterminables (art. 2415 C.civil). Ce principe vise à éviter les hypothèques générales et à limiter les garanties aux biens et créances spécifiquement identifiés et ce manifeste à deux niveaux :
- L’assiette de l’hypothèque : Chaque bien immobilier hypothéqué doit être désigné avec précision dans l’acte constitutif, interdisant les hypothèques générales. La non-conformité à cette règle peut entraîner la nullité de l’hypothèque, bien que cette nullité puisse être réparée par un acte postérieur.
- Créance garantie : L’hypothèque peut garantir une ou plusieurs créances, présentes ou futures, à condition qu’elles soient déterminables. Cette spécialité permet de limiter la portée des garanties, protégeant ainsi le débiteur tout en préservant le crédit.
Biens ou droits grevés
L’hypothèque peut être consentie sur des immeubles présents ou futurs (C. civ. art. 2414). En cas de copropriété, si l’hypothèque est consentie par tous les indivisaires, elle conserve son effet quel que soit le résultat du partage (C. civ. art. 2412).
+ Pour les professionnels : Il est important de rappeler que l’ouverture d’une procédure collective (redressement ou liquidation judiciaire), empêche le créancier d’inscrire une hypothèque.
Formalités de publicité
L’inscription de l’hypothèque au service de la publicité foncière est une formalité essentielle pour rendre l’hypothèque opposable aux tiers. Cette inscription permet de rendre publique l’existence de l’hypothèque et de protéger les droits du créancier contre les éventuels acquéreurs du bien hypothéqué. L’absence de cette formalité rend l’hypothèque inopposable aux tiers, bien qu’elle reste valable entre les parties.
À noter : L’inscription de l’hypothèque au fichier immobilier détermine son rang. Les hypothèques légales, judiciaires et conventionnelles prennent rang à la date de leur inscription. En cas de plusieurs inscriptions le même jour, leur rang respectif est déterminé indépendamment de l’ordre du registre (C. civ. art. 2418).
Les modes de saisies des biens hypothéqués
L’hypothèque conventionnelle, en tant que sûreté réelle immobilière, confère au créancier des droits spécifiques sur les biens grevés. En cas de défaillance du débiteur, le créancier peut recourir à divers modes de saisie pour faire exécuter son droit.
La saisie immobilière
La saisie immobilière est la procédure principale par laquelle le créancier hypothécaire peut faire vendre un bien immobilier grevé d’une hypothèque pour se faire payer sur le prix de vente. Cette procédure est strictement encadrée par le Code des procédures civiles d’exécution, spécifiquement les articles L. 311-1 à L. 341-1 et R. 311-1 à R. 322-72.
La saisie immobilière implique plusieurs étapes essentielles :
- Commandement de Payer : Le créancier doit d’abord délivrer un commandement de payer au débiteur, lui enjoignant de régler sa dette dans un délai déterminé.
- Publication du Commandement : Ce commandement doit être publié au service de la publicité foncière pour être opposable aux tiers.
- Assignation en Justice : Si le débiteur ne paie pas dans le délai imparti, le créancier peut alors l’assigner devant le tribunal pour obtenir la vente du bien.
- Adjudication : Le tribunal peut ordonner la vente aux enchères publiques du bien, et le produit de la vente sera distribué entre les créanciers selon leurs rangs de priorité.
Attribution judiciaire
L’attribution judiciaire permet au créancier d’obtenir la propriété de l’immeuble grevé en paiement de sa créance. Cependant, cette procédure est limitée :
- Elle est interdite lorsque l’immeuble constitue la résidence principale du débiteur.
- La valeur de l’immeuble doit être fixée par un expert, et toute différence entre cette valeur et le montant de la dette doit être compensée.
- L’attribution judiciaire n’est pas possible en période d’observation ou dans le cadre d’un plan de sauvegarde, de redressement judiciaire ou liquidation judiciaire.
A noter : Outre l’attribution judiciaire, celle-ci peut également résulter directement du contrat d’hypothèque par le truchement d’une clause expresse. En effet, le pacte commissoire est une clause qui permet au créancier de s’approprier le bien hypothéqué en cas de défaut de paiement par le débiteur. L’article 2452 du Code civil valide cette clause, sauf si l’immeuble constitue la résidence principale du débiteur.