Un accident du travail est un événement soudain qui cause un dommage corporel ou psychologique à un salarié lors de son activité professionnelle. Le fait à l’origine de l’accident doit intervenir soudainement, à une date certaine, c’est ce qui le distingue de la maladie professionnelle.
Conformément à l’article L.411-1 C.S.S : « Est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise. »
L’accident du travail sera reconnu si deux conditions sont réunies : il doit s’agir d’un accident soudain, par opposition à la maladie, et cet accident doit être en lien avec le travail.
Un accident soudain causant une lésion
La qualification d’accident suppose que le salarié soit victime d’une lésion soudaine intervenue pendant son travail. Les lésions doivent être en lien avec le travail et apparaître soudainement. Il peut s’agir de lésions anatomiques (ex : fracture d’un membre, brûlure), mais aussi de troubles fonctionnels de l’organisme résultant par exemple d’efforts (ex : douleur vive dans le dos en soulevant une charge lourde).
Les lésions apparues de façon lente et progressive au cours du travail et qui n’ont pas leur origine dans un fait précis et identifiable, ne sont pas des dommages résultant d’un accident de travail (Cass. soc., 30 nov. 1977, n°76-14.566).
La lésion peut être morale, ce qui permet d’inclure dans les accidents du travail les troubles psycho-sociaux à condition que la lésion soit rattachée à un événement précis lié au travail dont les troubles soient la conséquence.
Ainsi, a été prise en charge au titre des accidents du travail la dépression nerveuse d’un salarié consécutive à un difficile entretien d’évaluation avec son supérieur hiérarchique. En l’espèce, il était démontré que l’entretien avait été la cause de la dépression du salarié (Civ. 2ème, 1 juillet 2003, n° 02-30.576).
De même, il a été jugé que les troubles psychologiques, conséquences d’un choc émotionnel provoqué par une agression sur le lieu de travail, constituent un accident du travail (directeur d’agence bancaire menacé par un client armé d’un couteau et dont l’état de stress avait nécessité un traitement et un suivi psychologique (Civ. 2ème, 15 juillet 2004).
Il appartient au salarié de rapporter la preuve du lien de cause à effet entre la lésion psychique et le travail. Ainsi, la qualification d’accident du travail n’a pas été reconnu sur des faits de harcèlement, le salarié n’ayant pas apporté la preuve que l’arrêt de travail prescrit avait été causé par une brutale altération de ses facultés mentales en relation avec les événements invoqués (Cass. 2ème civ., 24 mai 2005, n°03-30.480).
Le caractère professionnel de l’accident
L’accident de travail nécessite que le salarié soit sous les ordres de l’employeur au moment où survient l’accident. En principe, l’accident de travail se produit pendant le temps et sur le lieu de travail.
Présomption d’imputabilité
L’article L. 411-1 code de sécurité sociale établit au profit de la victime une présomption d’imputabilité qui facilite la reconnaissance du caractère professionnel de l’accident. Ainsi, toute lésion survenue pendant le temps et sur le lieu du travail est présumée être survenue à l’occasion du travail.
Être sous l’autorité de l’employeur pendant le temps de travail
Pour que la présomption d’imputabilité trouve à s’appliquer, l’accident doit être survenu pendant le temps de travail, c’est-à-dire pendant les horaires de travail du salarié. Il s’agit donc du temps pendant lequel le salarié est soumis au contrôle et à l’autorité de l’employeur.
Au contraire, l’accident survenu en dehors des horaires de travail n’est pas considéré comme un accident du travail. Ce sera le cas si le salarié reste dans l’entreprise après la fin de son service pour motifs personnels. L’accident intervenu à ce moment ne sera pas considéré comme un accident du travail. Il en a été jugé ainsi concernant un accident survenu à un salarié alors qu’il réparait son cyclomoteur dans l’enceinte de l’entreprise (Cass. 2ème civ., 3 avr. 2003, n° 01-20.974).
Il en sera autrement si le salarié reste sous l’autorité de son employeur même en dehors de ses horaires. Par exemple, pour une femme de chambre d’un hôtel qui avait trouvé la mort par asphyxie, en participant à des opérations de sauvetage dans l’établissement de son employeur ravagé par un incendie. Dans ce cas, la jurisprudence a considéré qu’elle a péri dans un accident de travail étant donné qu’elle s’était placée sous l’autorité de son employeur pour servir ses intérêts. (Cour de Cass. 21 décembre 1988, 87-16.027). Solution identique lors du sauvetage d’un collègue de travail en train de se noyer (Cass. soc., 17 oct. 1973, n°72-10.865).
Enfin, les accidents pendant les pauses de travail (repas, cigarettes…) peuvent également être qualifié d’accident de travail si elles ont lieu à l’intérieur de l’entreprise et avec l’accord de l’employeur. (Cass. soc., 4 juin 1980, n°79-11.946).
Un accident sur son lieu de travail
La présomption d’imputabilité suppose également que l’accident survienne sur le lieu du travail.
Le lieu de travail s’entend du poste de travail, mais aussi des dépendances de l’établissement où est employé le salarié dès lors que l’employeur y exerce ses pouvoirs d’organisation, de contrôle et de surveillance (Cass. ass. plén., 3 juill. 1987 n°86-14.914).
Le lieu de travail est une notion appréciée extensivement. Il s’agit de tout endroit se trouvant sous l’autorité de l’employeur (ex : parking de l’entreprise ; usine et propriété de l’entreprise ; voie privée de circulation…). Cela concerne l’intérieur même de l’entreprise et les endroits où le salarié se rend à la demande de l’entreprise.
En effet, la présomption d’imputabilité est également applicable en cas d’accident survenu à l’extérieur de l’entreprise pendant la journée de travail du salarié. Concrètement, l’accident de travail sera présumé lorsqu’il se produit sur le lieu où le salarié est sous l’autorité de son employeur.
L’accident survenu à des salariés en mission : Le salarié bénéficie de la présomption d’imputabilité lorsque l’accident survient alors qu’il se trouvait en mission pour le compte de son employeur. Le salarié bénéficie d’une protection étendue durant tout le temps de la mission qu’il accomplit pour son employeur, peu importe que l’accident survienne à l’occasion d’un acte professionnel ou d’un acte de la vie courante. La Cour de cassation a en effet reconnu l’accident de travail pour un salarié en mission en Chine qui avait été découvert inanimés dans la salle de bains de sa chambre d’hôtel victime d’une hémorragie cérébrale (Cass. soc., 19 juill. 2001, n°99-21.536). Voir jurisprudence similaire relatif à un malaise ayant entrainé la mort (Cass. soc., 12 déc. 2002, n°01-20.516).
Télétravail : Conformément à l’article L.1222-9 du CT, « L’accident survenu sur le lieu où est exercé le télétravail pendant l’exercice de l’activité professionnelle du télétravailleur est présumé être un accident de travail au sens de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale. »
Le renversement de la présomption d’imputabilité
La présomption d’imputabilité pourra être écartée si l’accident est dû à une cause étrangère au travail. Seule la preuve d’une cause totalement étrangère au travail exclut le caractère professionnel de l’accident. (Cour de cassation, 28 janvier 2021, Pourvoi nº 19-25.722). Il revient à la caisse primaire d’assurance maladie de démontrer que la cause de l’accident est étrangère au travail
Une cause totalement étrangère au travail permet à la CPAM de se soustraire à verser les indemnités. Ainsi, le décès d’un salarié sur son lieu de travail, n’est pas un accident du travail dès lors que l’expertise démontre que la rupture d’anévrisme a pour origine un état pathologique préexistant, sans aucune relation avec le travail (Cass. 2ème civ., 6 avr. 2004, n°02-31.182).
Le comportement du salarié peut également écarter la présomption d’imputabilité. En effet, il sera possible de démontrer que le salarié s’est soustrait, par un fait volontaire, à l’autorité de son employeur. La soustraction à l’autorité de l’employeur doit être établie. Il en sera ainsi si le salarié recouvre sa pleine indépendance ou interrompt son travail pour un motif uniquement dicté par l’intérêt personnel et indépendant de son emploi (Soc. 9 juin 1966, n° 65-12.592).
Enfin, la jurisprudence reconnait que le suicide du salarié puisse être qualifié d’accident du travail s’il existe un lien de causalité entre le suicide et le travail. Il existe une présomption d’imputabilité si l’acte intervient sur le lieu et pendant le temps de travail. (Cass. 2ème civ., 7 avr. 2011, nº 10-16.157). En revanche, cette présomption disparaît lorsque le suicide est intervenu au domicile du salarié.