Abus de majorité : définition et analyse juridique

par | 3 Avr, 2023 | Articles droit des sociétés, Exprime Avocat

Abus de majorité

L’abus de majorité est une notion juridique qui découle de l’exercice inéquitable du pouvoir au sein d’une organisation, par une majorité de ses membres. Il s’agit d’une problématique courante dans les sociétés, les associations et les copropriétés, où les décisions sont souvent prises à la majorité.

Cet article a pour but d’analyser cette notion, en se basant sur les dispositions légales pertinentes et la jurisprudence.

Définition et cadre légal de l’abus de majorité

L’abus de majorité n’est pas directement défini par la loi. Toutefois, il peut être appréhendé à travers les critères dégagés par la jurisprudence et l’application des principes généraux du droit.

L’abus de majorité se définit comme le fait de prendre une décision sociale contraire à l’intérêt général de la société, et dans l’unique dessein de favoriser les membres de la majorité des associés au détriment de la minorité. (Cass. com., 18 avr. 1961, n°59-11.394).

Les principes généraux du droit prévoient une égalité entre associés et imposent des règles de bonne conduite et de loyauté entre les membres. En cas d’abus, les droits des minoritaires sont protégés et peuvent engager une action fondée sur l’article 1240 du code civil.  

Conditions de caractérisation de l’abus de majorité

Pour caractériser un abus de majorité, il est nécessaire de remplir trois conditions cumulatives :

Une décision contraire à l’intérêt social de la société

Une décision contraire à l’intérêt social s’apprécie de manière objective et prend en compte les intérêts patrimoniaux de la société. Ainsi, la jurisprudence révèle que les magistrats écartent généralement le grief d’abus de majorité lorsqu’ils trouvent des justifications économiques pour la délibération prise par les majoritaires.

Attention, la seule décision contraire à l’intérêt social, ne suffit pas à caractériser l’abus de majorité (Cass. com., 13 janv. 2021, n°18-21.860).

Une rupture d’égalité entre associés

L’utilisation du pouvoir majoritaire doit rompre l’égalité entre associés. C’est-à-dire qu’elle vise à servir les intérêts personnels ou particuliers de la majorité au détriment de ceux de la minorité et/ou de l’organisation dans son ensemble.

Le préjudice des minoritaires

L’abus de majorité doit causer un préjudice à la minorité. L’abus ne sera donc pas retenu si tous les associés subissent les conséquences de la décision prise (Cass. 3e civ., 18 avr. 2019, n°18-11.881). Le préjudice peut être matériel (perte financière) ou moral (atteinte à la réputation, discrimination).

Exemple d’abus de majorité

Rémunération excessive du dirigeant : Cela se produit lorsque les membres majoritaires de l’entreprise accordent une rémunération excessive au dirigeant, même si cela n’est pas justifié par la performance ou les résultats de l’entreprise (Cass. com.,15 janv. 2020, n° 18-11.580).

Mise en réserve et non distribution des dividendes : En principe, la constitution de réserves et le refus de distribuer les dividendes ne constituent pas un abus de majorité. Cela relève de la prudence, et d’une gestion légitime du dirigeant, privilégiant l’investissement dans la société (jurisprudence constante : Cass. com. 10 juin 2020, n°18-15.614).

Toutefois, cela s’apprécie au cas d’espèce, et le choix de non distribution des dividendes doit se justifier, et être cohérant avec les autres choix de gestion. Ainsi, l’abus de majorité a été caractérisé en cas de non-distribution de dividende lorsque le dirigeant avait augmenté sa rémunération. (Cass. 3e civ., 6 avr. 2022, n°21-13.287).

L’abus de majorité pourra également être reconnue dans d’autres situations. Par exemple, en cas de coup d’accordéon, d’augmentation de capital, conventions de trésorerie à risque, ou encore dans la prise de sûreté inappropriée (ex : cautionnement hypothécaire).

Sanctions et recours en cas d’abus de majorité

Les victimes d’un abus de majorité peuvent recourir à différentes voies de recours pour faire valoir leurs droits et obtenir réparation :

Annulation de la décision abusive

Les décisions prises en cas d’abus de majorité peuvent être annulées. Les membres minoritaires peuvent demander l’annulation de la décision dans un délai de trois ans à compter de la date de la décision (art. L.235-9 al.1er C .com). Le délai commence à courir à compter du jour où la nullité est encourue, c’est-à-dire du jour de la prise de la délibération. En cas d’annulation, la décision est réputée n’avoir jamais existé, et l’organisation doit revenir à la situation antérieure.

La responsabilité civile

La personne ou les personnes ayant commis un abus de majorité peuvent être tenus pour responsables des dommages causés à la minorité. La prise d’une délibération irrégulière, constitue pour l’auteur une faute, qui peut être source de responsabilité civile (Rappel L. 225-251 C.com).

La responsabilité pénale

Dans certains cas, l’abus de majorité peut également constituer une infraction pénale, telle que l’abus de confiance (article 314-1 du Code pénal), le détournement de fonds (article 313-1 du Code pénal) ou la discrimination (article 225-1 du Code pénal). Les membres majoritaires impliqués dans de telles infractions peuvent être poursuivis pénalement et condamnés à des peines d’amende, d’emprisonnement ou à des sanctions complémentaires, telles que l’interdiction d’exercer certaines activités ou fonctions.

La dissolution de l’organisation

Dans des situations extrêmes, lorsque l’abus de majorité compromet gravement la viabilité ou l’intérêt général de l’organisation, la dissolution de celle-ci peut être prononcée par les tribunaux, conformément à l’article 1844-7 du Code civil pour les sociétés. La dissolution entraîne la liquidation de l’organisation et la répartition de ses actifs entre les membres, selon les règles prévues par la loi ou les statuts.

Conclusion

L’abus de majorité est une problématique sérieuse qui peut nuire au bon fonctionnement et à la pérennité des sociétés. Les membres minoritaires doivent être vigilants et utiliser les recours légaux à leur disposition pour faire valoir leurs droits et protéger leurs intérêts. Les membres majoritaires, quant à eux, doivent respecter les principes de bonne foi, d’égalité et de loyauté envers l’ensemble des membres de l’organisation, afin d’éviter des conflits.

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