L’achalandage est une notion fondamentale en droit commercial, particulièrement dans le cadre de la valorisation et de la cession d’un fonds de commerce. Il désigne l’attractivité commerciale d’un établissement, résultant de la fidélisation de la clientèle et de divers éléments immatériels favorisant le développement de l’activité économique. Bien que l’achalandage ne bénéficie pas d’une définition légale explicite, il est largement reconnu par la jurisprudence et la doctrine comme un élément clé du fonds de commerce.
Définition
L’achalandage est l’ensemble des habitudes de consommation et de fréquentation d’un commerce ou d’un établissement, qui ne repose pas directement sur la notoriété du commerçant mais plutôt sur des facteurs externes et des flux de passage. Il se distingue de la clientèle, qui désigne une relation plus stable et personnelle entre l’entreprise et ses consommateurs.
La jurisprudence considère l’achalandage comme un élément immatériel du fonds de commerce qui peut influencer sa valeur et sa cessibilité. La Cour de cassation a ainsi affirmé que l’achalandage constitue une composante essentielle de la valeur d’un fonds de commerce dès lors qu’il est indépendant du commerçant lui-même.
Différence entre clientèle et achalandage
La distinction entre clientèle et achalandage repose principalement sur le degré de fidélisation :
- La clientèle est attachée à la personne du commerçant et résulte d’une relation personnalisée et durable.
- L’achalandage dépend davantage de facteurs extérieurs (emplacement, passage, proximité d’autres commerces, accessibilité, etc.).
Ainsi, un commerce situé dans une galerie marchande ou une zone à fort passage bénéficiera d’un achalandage important, tandis qu’une boutique de luxe disposera d’une clientèle ciblée et fidélisée.
Le rôle de l’achalandage dans le fonds de commerce
Un élément essentiel du fonds de commerce
L’achalandage fait partie des éléments incorporels du fonds de commerce, au même titre que la clientèle, le nom commercial ou encore l’enseigne. Il influe directement sur la valorisation du fonds et peut justifier une indemnité en cas de perte ou de détérioration.
L’article L. 141-5 du Code de commerce précise que l’achalandage fait partie des éléments cessibles d’un fonds de commerce, bien que sa transmission ne soit pas aussi évidente que celle de la clientèle.
L’impact sur la valorisation du fonds de commerce
La valorisation d’un fonds de commerce repose en partie sur la capacité d’un commerce à attirer un flux constant de clients potentiels. L’achalandage est donc un critère d’évaluation essentiel lors de :
- La cession d’un fonds de commerce : un achalandage élevé augmente la valeur de vente du fonds.
- L’évaluation des loyers commerciaux : un emplacement bénéficiant d’un fort achalandage entraîne généralement une augmentation du loyer.
- L’indemnisation en cas d’éviction : si un commerçant est privé de son local, l’achalandage perdu peut justifier une indemnité compensatoire.
La protection juridique
L’achalandage et le bail commercial
Le droit au bail commercial, régi par les articles L. 145-1 et suivants du Code de commerce, protège indirectement l’achalandage en encadrant la relation entre le propriétaire du local et le locataire commerçant. Ainsi, l’éviction du commerçant peut entraîner une indemnité d’éviction couvrant la perte de l’achalandage.
En effet, si le bailleur refuse de renouveler le bail sans motif légitime, il doit verser au locataire une indemnité compensatoire correspondant à la perte de la clientèle et de l’achalandage, conformément à l’article L. 145-14 du Code de commerce.
Dans le cadre de la concurrence déloyale
Un commerçant peut protéger son achalandage contre les actes de concurrence déloyale. La jurisprudence sanctionne plusieurs comportements susceptibles de nuire à l’achalandage :
- Le détournement de clientèle : installation d’un concurrent à proximité immédiate qui copie les pratiques commerciales d’un commerce existant.
- La désorganisation du marché : diffusion de fausses informations pour détourner l’achalandage d’un concurrent.
- Le parasitisme commercial : utilisation abusive de la notoriété d’un commerce pour attirer un flux de clients similaires.
La protection contractuelle
L’achalandage peut être protégé par des clauses spécifiques dans les contrats commerciaux, notamment :
- Les clauses de non-concurrence interdisant au cédant d’exploiter un commerce similaire à proximité après la cession de son fonds.
- Les clauses de maintien d’activité imposant au bailleur ou à un centre commercial de maintenir un certain nombre de commerces attractifs pour préserver l’achalandage général.
La disparition ou l’altération de l’achalandage
L’achalandage n’est pas un élément intangible. Il peut disparaître ou être affecté par des circonstances économiques et juridiques :
En cas de changement d’emplacement
Un commerçant qui déplace son activité risque de perdre une partie de son achalandage, en particulier s’il dépendait du passage et de la localisation. Cette situation pose un problème en cas de cession du fonds de commerce, car l’acheteur peut se retrouver avec une activité moins rentable que prévue.
L’atteinte à l’achalandage par des tiers
L’achalandage peut être altéré par des événements extérieurs tels que :
- La modification de l’environnement urbain (fermeture d’une rue, travaux prolongés, déplacement d’une station de transport public).
- L’installation d’un concurrent à proximité qui capte une partie du flux de passage.
- L’évolution des habitudes de consommation (essor du commerce en ligne, évolution démographique, etc.).
Dans certains cas, une indemnisation peut être demandée si la perte d’achalandage résulte d’une faute d’un tiers.
Controverses doctrinales autour de l’achalandage
La doctrine reste divisée quant à l’identification précise de l’achalandage par rapport à la clientèle. Certains auteurs soulignent l’extrême fragilité de la distinction, notamment en cas de commerces fortement dépendants d’une localisation précise ou d’un emplacement très attractif (marchés saisonniers, commerces touristiques).
Selon certain auteur : L’achalandage apparaît souvent comme une composante diffuse dont la distinction avec la clientèle stricto sensu ne convainc pas entièrement.
Conclusion
L’achalandage est une notion importante en droit commercial, influençant la valorisation des fonds de commerce et les relations entre commerçants et bailleurs. Bien qu’il ne bénéficie pas d’une protection juridique autonome, il est pris en compte dans diverses réglementations visant à protéger les commerçants contre les atteintes économiques. Son évaluation et sa préservation sont donc essentielles pour garantir la pérennité d’une activité commerciale.