Contrat de transport de marchandises : définition, régime juridique

par | 18 Oct, 2024 | Articles droit des transports, Exprime Avocat

Le contrat de transport de marchandises est un accord par lequel un transporteur professionnel, s’engage, moyennant une rémunération, à déplacer des biens d’un lieu à un autre selon un mode de transport et un itinéraire déterminé.

Ce contrat revêt une importance essentielle dans les échanges commerciaux et est soumis à une réglementation stricte, tant au niveau national qu’international. Cet article fournit une analyse détaillée des principaux aspects juridiques de ce contrat, notamment sa formation, son exécution, et la responsabilité des parties.

Définition et cadre juridique du contrat de transport de marchandises

Le contrat de transport de marchandises est un contrat synallagmatique, consensuel et onéreux. Il se forme dès l’accord des parties, généralement l’expéditeur et le transporteur, et peut inclure un tiers, le destinataire, qui devient partie prenante dès le début de la transaction (C. com., art. L. 132-8).

Ce contrat est régi par des textes législatifs spécifiques, notamment le Code de commerce (art. L. 133-1 à L. 133-7) et des décisions jurisprudentielles fondamentales, comme l’arrêt de la Cour de cassation du 14 décembre 2022, n° 21-14.438. À l’international, il est également encadré par des conventions telles que la CMR pour le transport routier de marchandises.

Les éléments fondamentaux du contrat de transport

Le premier élément caractéristique du contrat de transport est la maîtrise du déplacement, condition sine qua non pour que la convention soit qualifiée de contrat de transport. Dès lors que le déplacement constitue l’objet principal de la prestation, on est en présence d’un contrat de transport, quelle que soit la distance parcourue ou le moyen utilisé (CA Aix-en-Provence, 6 oct. 1993, no 2452/90). À l’inverse, si le déplacement est accessoire à une autre prestation, comme le stockage ou la manutention, le contrat ne sera pas un contrat de transport mais un contrat mixte ou un contrat de prestation de services.

Un autre aspect important est le statut du transporteur, qui doit être un professionnel rémunéré pour sa prestation. Cette rémunération est essentielle, car elle détermine le caractère commercial du contrat. Par exemple, un transport bénévole réalisé par un voiturier ne sera pas régi par les règles du droit des transports (C. civ., art. 1779). De même, un transport ponctuel effectué par un non-professionnel n’est pas considéré comme un véritable contrat de transport mais comme un contrat d’entreprise non dénommé (CA Amiens, 22 déc. 1976).

Enjeux pratiques de la qualification du contrat de transport

La qualification d’une convention en tant que contrat de transport emporte des conséquences juridiques importantes. Elle permet notamment de bénéficier des actions spécifiques prévues par le Code de commerce, comme l’action directe en paiement (C. com., art. L. 132-8) ou la forclusion d’un an pour engager une action en responsabilité contre le transporteur en cas de perte ou d’avarie des marchandises (C. com., art. L. 133-3). En outre, le régime de responsabilité du transporteur est particulièrement protecteur pour l’expéditeur, dans la mesure où ce dernier bénéficie d’une présomption de faute à l’encontre du voiturier en cas de dommages (Cass. com., 17 juin 1997, no 95-14.606).

Formation du contrat de transport de marchandises

Le contrat de transport se forme par l’accord des parties sans qu’un écrit ne soit nécessaire. Toutefois, la lettre de voiture reste un document probatoire essentiel. Ce document récapitule les informations essentielles du contrat : la description des marchandises, les modalités de livraison, et le coût du transport. L’absence de lettre de voiture ne remet cependant pas en cause la validité du contrat.

Dès l’accord formé, le transporteur devient responsable des marchandises dès leur prise en charge et jusqu’à leur livraison au destinataire. La jurisprudence confirme que cette responsabilité est effective même sans écrit, comme l’ont illustré les arrêts de la Cour d’appel de Grenoble (23 janvier 1990) et de Douai (3 mars 2009).

Obligations des parties

Obligations du transporteur

Le transporteur est tenu par deux obligations principales :

  • Obligation de sécurité : Que ce soit pour le transport de personnes ou de marchandises, le transporteur doit veiller à ce que le transport s’effectue dans des conditions de sécurité optimales.
  • Obligation de résultat : En matière d’exécution de l’obligation, le transporteur s’engage à livrer la marchandise en bon état au lieu déterminé et dans les délais convenus. 

Durant le transport, le transporteur garde la marchandise et doit respecter les instructions fournies par l’expéditeur, qui peut modifier des détails tels que le lieu ou la personne de livraison. En cas de perte ou d’avarie des marchandises pendant le transport, la responsabilité du transporteur peut être engagée.

Toute défaillance dans ces obligations engage la responsabilité contractuelle du transporteur, sauf s’il peut démontrer une cause exonératoire.

Obligations du donneur d’ordre (expéditeur)

L’expéditeur, de son côté, a l’obligation de :

  • Remettre les marchandises dans des conditions conformes au contrat et aux règles de sécurité, notamment pour les marchandises dangereuses ou périssables.
  • Payer le prix du transport, sauf stipulation contraire.

De plus, l’expéditeur est responsable des erreurs d’information fournies au transporteur, concernant la nature de la marchandise.

Avant de remettre la marchandise au transporteur, l’expéditeur doit s’assurer que celle-ci est correctement emballée et identifiée, incluant les informations essentielles sur son poids, son volume, ou encore son contenu. Le transporteur peut vérifier ces marchandises avant de les accepter et émettre des réserves si nécessaire. Une fois prises en charge, les marchandises sont sous la responsabilité du transporteur.

Obligation du destinataire

Le destinataire des marchandises a la responsabilité de vérifier que le contrat de transport a été correctement exécuté lors de la réception. En cas de non-conformité, il doit prendre les mesures nécessaires pour conserver son recours contre le transporteur, même si les marchandises sont transportées aux risques de l’expéditeur. Dans cette situation, le destinataire agit comme mandataire de l’expéditeur pour les formalités de réception, à l’instar du vendeur départ qui intervient comme mandataire du destinataire lors du transport.

Pour préserver son recours en cas de dommage ou d’avarie, deux mesures principales s’imposent :

Établir la nature et l’ampleur des dommages à la livraison : Le destinataire doit donc constater immédiatement les défauts visibles et les documenter de manière précise.

Accomplir la formalité prévue par l’article L. 133-3 du Code de commerce : Cette formalité consiste à notifier par écrit, dans un délai de trois jours, les réserves au transporteur par lettre recommandée. Cette étape permet de rendre le recours recevable, sous peine de forclusion.

Si l’une ou l’autre de ces conditions n’est pas remplie, le destinataire perd son recours contre le transporteur. En cas de retard de livraison, le destinataire doit également mettre en demeure le transporteur dès que le délai de livraison convenu est dépassé.

Le respect de ces formalités est essentiel pour protéger les droits du destinataire et garantir que le transporteur soit tenu responsable en cas de manquements.

Fin du contrat

La livraison des marchandises clôt l’exécution du contrat. Elle inclut une opération matérielle – la remise de la marchandise – ainsi qu’une opération juridique – la réception. Si le destinataire accepte la marchandise sans réserve, cela crée une présomption de conformité. Cependant, en cas de réserve ou de refus de la livraison, la responsabilité du transporteur peut être engagée (C. com., art. L. 133-3).

Paiement du prix

L’action en paiement du transporteur est une voie de recours dont dispose le transporteur pour exiger le règlement des sommes dues en contrepartie de sa prestation de transport. Selon l’article L. 132-8 du Code de commerce, cette action peut être exercée directement contre l’expéditeur ou le destinataire.

L’expéditeur ou le destinataire ne peuvent donc pas refuser de payer le transporteur en se basant sur les termes du contrat de vente qui ferait supporter le coût du transport à l’une des parties.

En vertu du principe de l’effet relatif des contrats, le contrat de vente n’est pas opposable au transporteur, qui n’est pas partie à cet accord. Ainsi, le transporteur a le droit d’exiger le paiement de sa prestation indépendamment des accords entre l’expéditeur et le destinataire concernant la répartition des frais de transport.

Problème de livraison et refus de paiement

Le transporteur est en droit de réclamer le paiement même si la marchandise n’a pas été livrée en raison d’une cause non imputable à sa faute, à condition qu’il ait rempli ses obligations en ce qui concerne la prise en charge et le déplacement des marchandises.

En cas de non-paiement, le transporteur peut invoquer un privilège sur les marchandises transportées, lui permettant de retenir ces biens jusqu’à obtention du règlement. Cette garantie renforce la protection des droits du transporteur face aux risques d’insolvabilité de ses cocontractants.

Responsabilité du transporteur

Le transporteur de marchandises est soumis à une responsabilité stricte régie par l’article L. 133-1 du Code de commerce. Cette responsabilité repose sur une obligation de résultat, impliquant que le transporteur est présumé responsable en cas de perte ou d’avarie des marchandises, sauf s’il peut prouver une cause exonératoire (force majeure, vice propre de la marchandise ou faute de l’expéditeur).

 Cette responsabilité s’engage automatiquement dès la constatation du dommage à la livraison, sans que l’expéditeur ou le destinataire n’ait à prouver une faute du transporteur.

Toutefois, sa responsabilité peut être limitée ou exonérée dans certains cas, comme la force majeure, la faute de l’expéditeur ou un vice propre de la marchandise. La jurisprudence a précisé ces conditions, notamment dans l’arrêt du 2 février 2022, n° 19-25.075. Pour échapper à cette présomption de responsabilité, le transporteur doit démontrer l’existence d’une cause exonératoire et prouver le lien de causalité entre cette cause et le dommage. En cas de doute sur la cause du dommage, la responsabilité du transporteur demeure engagée.

La responsabilité du transporteur est d’ordre public, interdisant toute clause contractuelle visant à l’exclure. Toutefois, des clauses limitatives d’indemnité sont acceptées si elles sont claires et proportionnées au dommage.

L’action en responsabilité contre le transporteur est prescrite au bout d’un an ou trois ans (selon le mode de transport), à partir de la livraison. Le transporteur peut exercer une action en garantie contre ses sous-traitants en cas de transport successif.

Voir également l’article : Responsabilité du transporteur

Les clauses limitatives et exonératoires de responsabilité

Le contrat de transport inclut souvent des clauses limitatives ou exonératoires de responsabilité au profit du transporteur, notamment en cas de force majeure, de faute du cocontractant ou d’événements imprévisibles. Cependant, ces clauses sont strictement encadrées par la loi, notamment par l’article 1170 du Code civil, qui dispose que toute clause privant de sa substance l’obligation essentielle du débiteur est réputée non écrite.

Dans les contrats de transport international, les conventions comme la CMR et la Convention de Varsovie prévoient des régimes de limitation de responsabilité, mais elles permettent aussi à l’expéditeur de déclarer une valeur plus élevée pour la marchandise afin d’augmenter l’indemnisation en cas de perte ou de dommage.

Conclusion

Le contrat de transport de marchandises régit les relations entre expéditeurs, transporteurs et destinataires. En raison des enjeux économiques et des risques associés au transport de biens, il est important de bien encadrer les obligations et responsabilités des parties. La rédaction précise du contrat et la connaissance des mécanismes de responsabilité permettent de sécuriser les échanges et de minimiser les litiges éventuels.

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