Action judiciaire contre le transporteur maritime

par | 9 Oct, 2024 | Articles droit des transports, Exprime Avocat

L’action judiciaire contre un transporteur maritime est généralement engagée pour obtenir réparation des préjudices subis lors du transport de marchandises. Ces préjudices peuvent inclure des pertes, des avaries ou des retards dans la livraison, entraînant des conséquences financières pour les parties impliquées. Le recours à la justice devient nécessaire lorsque les obligations contractuelles du transporteur, telles que stipulées dans le contrat de transport ou le connaissement, ne sont pas respectées. L’action vise donc à établir la responsabilité du transporteur, à faire valoir les droits des propriétaires ou ayants droit des marchandises, et à obtenir une indemnisation pour les dommages subis.

Le droit d’action contre un transporteur maritime découle essentiellement du contrat de transport maritime. Conformément à l’article 31 du Code de procédure civile (CPC), pour engager une action en justice, il est nécessaire que le demandeur justifie de son intérêt à agir.

En principe, en droit maritime, seul le détenteur légitime du connaissement peut exercer une action en justice contre le transporteur. Cependant, à la suite de plusieurs contentieux, les tribunaux admettent aujourd’hui que toute personne ayant un intérêt direct, y compris des tiers non mentionnés dans le connaissement, puisse agir dès lors qu’elle subit un préjudice lié au transport.

Droit d’action en justice et connaissement

Le connaissement est à la fois un titre de propriété et un document de transport, garantissant certains droits à son porteur. La règle générale est que seul le détenteur légitime du connaissement peut exercer une action en justice contre le transporteur. Toutefois, plusieurs situations peuvent se présenter en fonction de la nature du connaissement :

  • Connaissement à personne dénommée : Seul le destinataire désigné a le droit d’agir.
  • Connaissement à ordre : Le dernier endossataire a qualité pour agir. Ce dernier peut également être un commissionnaire, un destinataire réel ou tout autre intéressé ayant subi un préjudice en lien direct avec le transport (Cass. com., 24 nov. 1975, no 74-12.782).

En outre, certaines pratiques locales peuvent influencer ce régime, comme l’exige la loi russe dans le port de Saint-Pétersbourg, qui impose des restrictions spécifiques à l’endossement (Cass. com., 10 févr. 2015, no 13-27.767).

Autres personnes ayant droit d’agir

Le destinataire :

Initialement, seule la personne mentionnée dans le connaissement pouvait agir contre le transporteur. Cependant, la Cour de cassation a étendu ce droit en reconnaissant que le destinataire réel peut agir en justice à condition que sa qualité soit démontrée par les mentions du connaissement ou d’autres documents pertinents. Ce principe a été affirmé dans des arrêts importants (voir Cour de Cassation, chambre commerciale du 15 juill. 1987 – no 86-11.607, ou encore, Cass. com., 29 nov. 1994 no 92-20.939).

Bien que le droit d’action du destinataire réel soit désormais reconnu, il demeure subordonné à la preuve d’un préjudice personnel. Par exemple, la Cour de cassation a jugé que l’action en responsabilité pour pertes ou avaries est ouverte au destinataire réel si celui-ci est le seul à avoir supporté le préjudice (Cass. com., 7 juill. 1992, no 90-14.151). Cependant, l’absence de preuves convaincantes concernant la qualité de destinataire réel peut entraîner l’irrecevabilité de l’action (CA Aix-en-Provence, 21 mai 2015, no 13/02707).

Tiers et intéressés :

Outre les parties au contrat, les tiers peuvent également se voir reconnaître un droit d’action sous certaines conditions. La jurisprudence récente admet que des personnes non mentionnées sur le connaissement, mais ayant un intérêt direct au transport, puissent agir. Ce droit d’action s’étend aux intermédiaires de transport, tels que les commissionnaires, ainsi qu’aux sous-contractants ayant subi un préjudice personnel lié au transport.

Par exemple, un commissionnaire de transport peut agir en responsabilité contre le transporteur maritime, à condition de démontrer un préjudice direct, en particulier lorsqu’il a garanti l’exécution du contrat vis-à-vis de son propre client (Cass. com., 19 déc. 2000, no 98-12.726). De même, les loueurs de matériel ou les affréteurs peuvent engager la responsabilité du transporteur en cas de préjudice subi (CA Versailles, 3 déc. 2009, no 08/02702).

Assignation du transporteur maritime et difficultés

L’assignation en justice du transporteur en cas de perte, avaries ou dégâts des marchandises, soulève souvent des difficultés. En effet, l’identification du transporteur véritable ou de la compétence de juridiction pose parfois des problèmes.

Identification du transporteur

La jurisprudence a confirmé à maintes reprises que les éléments intrinsèques du connaissement priment sur toute autre preuve pour identifier le transporteur. Par exemple, la Cour d’appel de Montpellier a jugé que l’émetteur du connaissement est présumé être le transporteur, même s’il se présente comme un simple agent ou intermédiaire dans l’opération de transport (CA Montpellier, 23 janv. 2001, no 99/03428).

De plus, les règles de Rotterdam, dans leur article 37, renforcent cette position en stipulant que si le transporteur est identifié dans le document de transport, toute autre indication est sans effet. Ce texte souligne la primauté des mentions du connaissement, éliminant ainsi la possibilité pour le transporteur ou les autres parties de se soustraire à leurs obligations en invoquant des éléments extérieurs.

La difficulté de l’assignation en cas de pluralité d’acteurs

L’identification du transporteur peut devenir complexe lorsque plusieurs entités sont impliquées dans le transport, comme dans le cadre d’un affrètement ou de la sous-traitance. Cette pluralité d’acteurs complique l’assignation et peut rendre difficile l’établissement de la responsabilité du véritable transporteur.

Service commun ou consortium

Dans certains cas, des navires sont exploités en service commun ou en consortium, impliquant plusieurs transporteurs. Lorsque plusieurs compagnies sont mentionnées sur un même connaissement, il peut être difficile pour l’ayant droit à la marchandise d’identifier avec précision le transporteur responsable. La jurisprudence a reconnu que, dans de telles situations, les compagnies peuvent être conjointement responsables mais la prudence impose souvent d’assigner l’ensemble des transporteurs mentionnés.

Affrètement et confusion sur le transporteur

Dans le cadre d’un affrètement à temps ou au voyage, l’affréteur et le fréteur peuvent tous deux jouer des rôles distincts dans le transport. La question de savoir lequel est le transporteur dépend souvent des mentions du connaissement. La Cour de cassation a confirmé que seul le transporteur mentionné au connaissement, qu’il s’agisse de l’affréteur ou du fréteur, peut être tenu responsable. Dans certains cas, l’assignation du propriétaire du navire peut être irrecevable si celui-ci a délégué la gestion commerciale à un affréteur qui a émis les connaissements.

Règle de compétence juridictionnelle

Le transport maritime est régi par des règles de compétence complexes, qui mêlent droit national et international. En France, les litiges maritimes relèvent principalement des tribunaux de commerce, en vertu de l’article L. 110-2 du Code de commerce, sauf si un accord d’arbitrage existe. La compétence territoriale suit les règles du Code de procédure civile, permettant de saisir le tribunal du lieu de résidence du défendeur ou celui de la livraison de la marchandise.

Sur le plan international, les conventions comme celle de Hambourg et le règlement européen n° 1215/2012 encadrent les compétences juridictionnelles. En matière contractuelle, les clauses attributives de juridiction et compromissoires, notamment dans les connaissements, doivent respecter les lois applicables. La jurisprudence française et européenne favorise l’autonomie de l’arbitrage, y compris en imposant parfois ces clauses à des tiers, comme dans le cas des commissionnaires ou détenteurs de connaissements non signés.

Ainsi, le choix de la juridiction compétente peut varier selon les lois nationales, européennes ou internationales, rendant cruciale l’insertion et l’acceptation des clauses pertinentes pour résoudre les litiges maritimes.

Conclusion

L’assignation du transporteur maritime présente de nombreuses difficultés liées à l’identification du véritable transporteur, surtout dans des situations impliquant plusieurs acteurs ou des arrangements complexes tels que les affrètements et les consortiums. Le connaissement demeure essentiel pour identifier le transporteur. La jurisprudence, abondante en la matière, s’efforce d’apporter des réponses pour sécuriser les actions engagées contre le transporteur en tenant compte des réalités commerciales du transport maritime.

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