L’hypothèque est une sûreté réelle immobilière qui permet à un créancier de garantir le paiement de sa créance par l’affectation d’un bien immobilier, sans que le propriétaire ne soit dépossédé de celui-ci. Cette sureté est parfois nécessaire dans le financement d’un bien, et ce, afin de sécurisation le crédit. Cet article propose une analyse générale des hypothèques.
Définition légale
Selon l’article 2385 du Code civil, l’hypothèque est définie comme « l’affectation d’un immeuble en garantie d’une obligation sans dépossession de celui qui la constitue« . Cette définition met en avant la caractéristique fondamentale de l’hypothèque : elle confère un droit réel au créancier sans pour autant dessaisir le propriétaire du bien hypothéqué.
En cas de défaillance du débiteur, le créancier peut faire vendre l’immeuble grevé pour être payé en priorité sur le prix de vente (droit de préférence) et de poursuivre l’immeuble entre les mains de tout acquéreur (droit de suite).
Caractéristiques principales
L’hypothèque est caractérisée par plusieurs éléments distinctifs :
- Caractère accessoire : L’hypothèque est un droit réel accessoire, ce qui signifie qu’elle dépend de l’existence d’une créance à garantir. Si la créance disparaît, l’hypothèque s’éteint également, sauf en cas de rechargement.
- Caractère indivisible : L’hypothèque est indivisible, ce qui signifie qu’elle grève l’intégralité du bien hypothéqué, indépendamment de la division de la créance ou du bien. Chaque partie du bien ou chaque créance reste entièrement garantie par l’hypothèque jusqu’à satisfaction totale du créancier.
- Droit réel : L’hypothèque confère un droit réel au créancier, portant directement sur le bien hypothéqué. Ce droit permet au créancier de saisir et de vendre le bien pour être payé en priorité sur le prix de vente.
- Droit de suite et de préférence : Le créancier hypothécaire bénéficie du droit de suite, lui permettant de saisir le bien hypothéqué en quelque main qu’il se trouve, et du droit de préférence, lui accordant une priorité de paiement sur le prix de vente du bien.
Les différentes catégories d’hypothèques
En droit, les hypothèques se subdivisent en trois catégories principales : les hypothèques conventionnelles, légales et judiciaires.
- Hypothèque conventionnelle : L’hypothèque conventionnelle résulte d’un accord entre les parties, généralement formalisé par un acte notarié. Elle est souvent utilisée dans le cadre de prêts immobiliers pour garantir le remboursement du crédit.
- Hypothèque légale : L’hypothèque légale est accordée par la loi à certains créanciers, comme les époux pour garantir leurs droits dans le cadre de leur régime matrimonial ou l’État pour le recouvrement des impôts.
- Hypothèque judiciaire : L’hypothèque judiciaire résulte d’un jugement. Elle peut être ordonnée par un tribunal pour garantir l’exécution d’une décision de justice, par exemple dans le cadre d’une condamnation pécuniaire.
Objet de l’hypothèque
Biens susceptibles d’hypothèque
Tous les droits réels immobiliers dans le commerce peuvent être hypothéqués. Cela inclut la propriété, l’usufruit, la nue-propriété, et certains droits liés à des baux emphytéotiques. L’hypothèque s’étend également aux améliorations survenues à l’immeuble hypothéqué et aux accessoires réputés immeubles.
Certains biens sont exclus du régime de l’hypothèque. Il s’agit notamment des biens inaliénables, des biens du domaine public, et des droits d’usage et d’habitation.
Publicité de l’hypothèque
L’inscription
L’hypothèque doit être publiée pour être opposable aux tiers. Sans inscription, l’hypothèque ne peut être opposée à des tiers. Cette exigence de publicité permet la transparence des transactions immobilières et protège les intérêts des créanciers hypothécaires.
L’inscription est essentielle pour que le créancier puisse exercer ses droits de suite et de préférence. Les formalités d’inscription sont régies par les articles 2421 et suivants du Code civil. L’inscription de l’hypothèque est réalisée au moyen d’un bordereau déposé au service de la publicité foncière. Ce bordereau doit contenir des mentions obligatoires telles que la désignation des parties, l’indication de la créance garantie, et la description du bien hypothéqué. L’exactitude et la complétude de ces informations sont essentielles pour la validité de l’inscription. L’inscription doit être renouvelée périodiquement pour maintenir sa validité.
La radiation
La radiation de l’inscription peut être volontaire ou judiciaire, entraînant la suppression de l’inscription. La radiation volontaire intervient lorsque le débiteur a remboursé sa dette, tandis que la radiation judiciaire peut être ordonnée par un tribunal en cas de contestation de l’inscription.
Transmission de l’hypothèque
L’hypothèque peut être transmise avec la créance garantie, soit à titre accessoire en cas de cession de créance ou de décès, soit à titre principal, indépendamment de la créance, par subrogation ou cession de rang. Le créancier peut également subroger un autre créancier dans son hypothèque dans la mesure de sa créance.
Extinction de l’hypothèque
L’extinction se réalise lorsque les conditions justifiant la garantie ne sont plus présentes, entraînant la fin des droits du créancier hypothécaire sur le bien grevé.
L’hypothèque peut s’éteindre pour diverses raisons, dont les principales sont le paiement de la créance, la renonciation par le créancier, la confusion des droits ou l’extinction de la créance garantie.
- Paiement de la créance garantie
La cause la plus courante d’extinction de l’hypothèque est le paiement intégral de la créance garantie. Lorsque le débiteur rembourse la totalité du montant dû, l’hypothèque s’éteint automatiquement. Le créancier doit alors procéder à la mainlevée de l’hypothèque en informant le service de la publicité foncière pour radier l’inscription hypothécaire.
- Renonciation par le créancier
Le créancier hypothécaire peut décider de renoncer à son droit hypothécaire. Cette renonciation peut être expresse ou tacite. En pratique, la renonciation expresse se fait par acte notarié et doit être inscrite au service de la publicité foncière pour être opposable aux tiers. La renonciation tacite peut résulter, par exemple, de l’acceptation par le créancier d’une autre garantie en substitution de l’hypothèque.
- Confusion
L’hypothèque s’éteint par confusion lorsque le créancier devient propriétaire de l’immeuble hypothéqué. Cela se produit, par exemple, lors d’une transmission du bien par succession ou par vente.
La confusion entraîne la réunion des qualités de créancier et de propriétaire, ce qui rend l’hypothèque sans objet (Cass. 1re civ., 27 nov. 2009, no 07-18.739).
- Extinction de la créance principale
L’extinction de la créance garantie entraîne automatiquement celle de l’hypothèque. Cela peut se produire par l’effet de la novation, la remise de dette, la compensation, ou l’annulation de la créance principale. En cas de novation, l’hypothèque peut être maintenue pour garantir la nouvelle créance avec le consentement des parties (C. civ., art. 1334).
- Mainlevée (purge) et radiation. La mainlevée est l’acte par lequel le créancier reconnaît que la créance est éteinte et accepte de radier l’inscription hypothécaire. Elle nécessite souvent un acte notarié et doit être enregistrée au service de la publicité foncière pour être opposable aux tiers. Elle peut également être prononcée par le tribunal en cas de litige entre le créancier et le débiteur concernant l’extinction de la créance.
Effets de l’extinction de l’hypothèque
L’extinction de l’hypothèque a pour effet de libérer le bien grevé de toute charge hypothécaire, permettant ainsi au propriétaire de disposer librement de son bien. Les tiers acquéreurs ou créanciers peuvent vérifier la situation hypothécaire du bien grâce à la publicité foncière. En l’absence de mainlevée, l’inscription hypothécaire reste opposable et peut empêcher des transactions ultérieures sur le bien.
Avantages et inconvénients de l’hypothèque
L’hypothèque présente certains avantages significatifs :
Pour les créanciers :
- Choix de l’action en cas de non-paiement : le créancier hypothécaire dispose de plusieurs procédure pour réaliser sa sûreté en cas de défaillance du débiteur. Il pourra demander la saisie et la vente judiciaire du bien hypothéqué. Cette procédure lui permettra de récupérer le montant de la créance sur le produit de la vente. Il pourra également demander l’attribution judiciaire du bien, devenant ainsi propriétaire du bien hypothéqué pour la valeur de sa créance. (Possibilité de devenir automatiquement propriétaire du bien en cas de défaillance du débiteur, en présence d’une clause expresse, désigné pacte commissoire).
- Droit de préférence : Le créancier hypothécaire est payé avant les autres créanciers sur le produit de la vente de l’immeuble.
- Droit de suite : L’hypothèque suit le bien, même en cas de changement de propriétaire.
Pour les débiteurs :
- Pas de dépossession : Le débiteur conserve l’usage de l’immeuble hypothéqué. Il a le droit d’administrer, de jouir et de disposer du bien hypothéqué. Toutefois, il ne doit pas accomplir d’actes qui déprécieraient la valeur du bien. De plus, les contrats prévoient souvent une clause imposant de demander l’autorisation au créancier avant toute cession du bien hypothéqué.
- Flexibilité : L’immeuble peut garantir plusieurs dettes successives ou simultanées.
Cependant, l’hypothèque comporte également des inconvénients :
- Formalités complexes et coûteuses : La constitution et la réalisation de l’hypothèque impliquent des procédures notariales et des frais de publicité foncière.
Le petit + : Pour pallier les frais de l’hypothèque, le créancier peut solliciter une simple promesse d’hypothèque. Celle-ci est moins onéreuse, car elle se formalise sous seing privé, mais elle ne constitue pas une véritable garantie. Dans ce cas, les contrats de prêts immobiliers contiennent souvent une clause d’autorisation du créancier avant la cession du bien immobilier objet du contrat, ou encore avant sa mise en hypothèque.
Réforme récente
L’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 a modernisé le droit des hypothèques en introduisant des modifications importantes. Cette réforme a réorganisé et renuméroté les articles du Code civil relatifs aux hypothèques, tout en introduisant des ajustements pour renforcer l’efficacité des hypothèques légales, judiciaires et conventionnelles.
Les articles 2385 à 2474 du Code civil couvrent désormais les dispositions générales, les hypothèques légales, judiciaires, et conventionnelles, ainsi que les effets, l’inscription, et l’extinction des hypothèques.
L’hypothèque constitue un mécanisme de sûreté essentiel. Sa complexité nécessite une maîtrise approfondie des dispositions légales. Le cabinet vous conseille en cas de questions ou liées à l’hypothèque.