Le nantissement de fonds de commerce est une sûreté réelle qui confère à son titulaire une garantie sur ses créances. Cette garantie permet au créancier de faire valoir un droit de préférence et un droit de suite sur le fonds grevé.
En pratique, il s’agit d’un contrat par lequel un débiteur consent à son créancier une garantie sur ses dettes dont l’assiette constitue son fonds de commerce. Dans certains cas, il peut également résulter d’une décision judiciaire.
Qu’il soit conventionnel ou judiciaire, la constitution du nantissement est soumise au respect de certaines formalités.
Le nantissement conventionnel
Le nantissement conventionnel est un contrat passé entre le propriétaire du fonds et un créancier, souvent la banque qui a octroyé le crédit. Le fonds de commerce est alors affecté en garantie du paiement du prêt.
Le contenu du nantissement (l’assiette de garantie)
Conformément à l’article L.142-2 du code de commerce : « Sont seuls susceptibles d’être compris dans le nantissement :
- L’enseigne et le nom commercial,
- Le droit au bail,
- La clientèle et l’achalandage,
- Le mobilier commercial, le matériel ou l’outillage servant à l’exploitation du fonds,
- Les brevets d’invention, les licences, les marques, les dessins et modèles industriels, et généralement les droits de propriété intellectuelle qui y sont attachés ».
Cette liste est limitative et exclut certains éléments qui pourraient éventuellement faire partie du fonds de commerce tels que, la marchandise, ou encore éventuellement certaines créances.
L’article L.142-2 du code de commerce précise qu’à défaut de désignation expresse et précise dans l’acte de nantissement, celui-ci ne comprend que l’enseigne, le nom commercial, le droit au bail et la clientèle.
Les parties ne pourront donc pas exclure certains éléments essentiels (ex : clientèle, droit au bail) ou au contraire ajouter des éléments non prévus par l’article L.142-2 du code de commerce (marchandise). Ils devront donc désigner expressément les éléments qu’ils souhaitent voir inclus dans le nantissement.
Les formalités :
Conformément à l’article L.142-3 du code de commerce : « Le contrat de nantissement est constaté par un acte authentique ou par un acte sous seing privé, dûment enregistré. […] ». L’acte de nantissement doit être établi par écrit. En principe, le contenu de l’acte est libre. Il doit néanmoins contenir les mentions prévues par l’article R.143-8 du code de commerce. Ainsi, l’acte doit obligatoirement contenir :
- noms et prénoms, domicile et profession du créancier et du débiteur ;
- la date et la nature du titre ;
- la valeur du fonds, en distinguant tous ses éléments ;
- la désignation du fonds de commerce, d’éventuelles succursales, avec toutes les précisions sur la nature de leurs opération, leur siège…
L’acte de nantissement doit être enregistré. Cette formalité permet de donner « date certaine » à l’acte et également de procéder à l’inscription auprès du greffe.
Un original de l’acte dument enregistré doit être déposer auprès du greffe du tribunal compétent, accompagné de deux exemplaires du bordereau d’inscription dans les 30 jours suivant la signature de l’acte constitutif (art. L.142-4 code de commerce). Voir formalités greffe.
Selon le cas, une inscription supplémentaire doit être effectuée à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) si le nantissement porte également sur des droits de propriété industrielle (marque, brevet, dessin et modèle) ou un logiciel.
L’inscription de nantissement de fonds de commerce est valable pour 10 ans (143-19 C.com). Elle peut toutefois être renouvelée. De surcroît, le nantissement peut aussi être modifié. En cas de cession du fonds de commerce, l’inscription doit être radiée si la créance a été réglée.
L’initiative de la radiation appartient aussi bien au créancier qu’au débiteur sur justificatif témoignant de l’accord entre les deux parties ou par un acte de mainlevée. La radiation permet la délivrance d’un certificat de radiation.
Attention l’obligation d’enregistrement est supprimée à partir du 1er janvier 2023 conformément à la réforme du droit des sûretés qui modifie notamment l’article L.142-3 du code de commerce (voir Ord. n°2021-1192, 15 sept. 2021, art. 27).
Le nantissement judiciaire
Les créanciers d’un commerçant peuvent également demander en justice un nantissement de fonds de commerce en cas d’urgence et si le recouvrement de la créance semble en péril.
En principe, l’autorisation relève de la compétence du juge de l’exécution du tribunal judiciaire mais peut également être accordée par le président du tribunal de commerce (art.L.511-3 C.com). Toutefois, cette autorisation n’est pas toujours nécessaire, notamment si le créancier bénéficie d’un titre exécutoire.
Une fois l’autorisation accordée, une inscription provisoire est faite au greffe du tribunal de commerce dans la quinzaine suivant l’ordonnance (R.532-2 CPCE). Si la mesure conservatoire n’a pas été exécutée dans les trois mois de l’ordonnance du juge, l’autorisation donnée par celui-ci est caduque (art. R. 511-6 CPCE). Le débiteur est informé de l’inscription provisoire dans les huit jours du dépôt des bordereaux (art.532-5 CPCE) et peut en demander la mainlevée en référé, s’il estime qu’elle est infondée. Cette publicité provisoire dure trois ans mais peut être renouvelée (art. R. 532-7 CPCE).
Enfin, l’inscription provisoire est suivie de l’inscription définitive. Elle est faite à l’initiative du créancier, dans les deux mois de la décision de justice définitive (R.533-4 CPCE).
L’efficacité du nantissement de fonds de commerce :
Le créancier nantis bénéficie d’un droit de suite (art.143-12 C.com) en cas de cession du fonds. Il peut « faire ordonner la vente du fonds qui constitue leur gage, huit jours après sommation de payer faite au débiteur ou au tiers détenteur » (art.L.143-5 C.com). Le tiers (acquéreur du fonds de commerce) devra donc désintéresser les créanciers, sous peine d’une vente forcée du fonds.
En outre, le nantissement de fonds confère également un droit de préférence (142-5 C.com). En principe, les créanciers nantis ont le droit de se faire payer en priorité sur le prix de vente du fonds, par préférence aux créanciers chirographaires.
Il convient néanmoins de préciser que le nantissement de fonds de commerce est une garantie fragile. En effet, la garantie dépend de la valeur du fonds de commerce et souffre des aléas de son exploitation ainsi que de la gestion de l’exploitant. Si les affaires du débiteur périclitent, la valeur du fonds risque de se réduire à presque rien, comme la garantie. C’est pourquoi, le nantissement est souvent utilisé comme une garantie complémentaire afin de compléter d’autres sûretés, comme le cautionnement ou le gage.
Toutefois, le nantissement de fonds de commerce présente un avantage essentiel. En effet, toute modification de structure ou aliénation du fonds de commerce ne peut intervenir sans le créancier (art.L.143-1 C.com et suivants). Ainsi, il confère au créancier un droit de regard sur les affaires de son débiteur.
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