La banqueroute constitue un délit pénal qui sanctionne des faits illicites intervenus à l’occasion d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. Le délit est prévu aux articles L. 654-1 à L. 654-7 du Code de commerce.
La qualité de l’auteur de l’infraction
Les personnes susceptibles d’être poursuivies du chef de banqueroute sont listées à l’article L. 654-1 du Code de commerce.
Il s’agit en l’occurrence :
- Des commerçants, artisans, agriculteurs et les personnes physiques exerçant une activité indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ;
- De toute personne ayant, directement ou indirectement, en droit ou en fait, dirigé ou liquidé une personne morale de droit privé ;
- Des personnes physiques représentants permanents de personnes morales dirigeant des personnes morales de droit privé.
Toutefois, l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est une condition nécessaire à l’engagement des poursuites contre les personnes visées à l’article L. 654-1 du code de commerce pour les faits énumérés à l’article L. 654-2 du même code.
Il est à préciser que toutes personnes ayant aidé ou facilité la réalisation d’un délit de banqueroute peut être poursuivi et condamné pour complicité avec les mêmes peines que celles applicables à l’auteur principal (art. 121-6 CP).
Les faits constitutifs de délit de banqueroute
Les comportements incriminés au titre du délit de banqueroute sont prévus à l’article L. 654-2 précité du code de commerce. Il s’agit pour ces personnes :
- Avoir l’intention d’éviter ou retarder l’ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire par l’achat en vue d’une revente au-dessous du cours ou l’emploi de moyens ruineux pour se procurer des fonds.
L’achat pour la revente à perte est une pratique déjà sanctionner par l’article L. 442-2 C.com. Concernant l’emploi de moyen ruineux pour se procurer des fonds, il s’agit souvent d’emprunt à des taux élevé ou de l’émission d’effet de commerce de complaisance. Il est à préciser que le caractère ruineux des moyens utilisés s’apprécie par rapport à la capacité financière globale de la société (Cass. crim., 22 sept. 2010, n°09-83.274).
- Le détournement ou dissimulation de tout ou partie de l’actif du débiteur ;
Il s’agit dans ce cas de protéger le gage des créanciers en dissuadant le gérant de détourner le patrimoine de la société. Le détournement réalisé avant la cessation de paiement constitue un abus de biens sociaux, alors que celui réalisé après la date de cessation de paiement constitue un délit de banqueroute.
- L’augmentation frauduleuse du passif du débiteur ;
- L’absence de tenue de toute comptabilité ;
- La tenue d’une comptabilité fictive ou manifestement incomplète ou irrégulière ;
- Le fait de faire disparaitre des documents comptables.
NB : Pour que l’on puisse parler d’un délit de banqueroute, il faut nécessairement une commission de l’un de ces actes par une personne visée à l’article L. 654-1du code commerce et que celle-ci soit survenue pendant l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.
La répression du délit banqueroute
Conformément à l’article L. 654-3 du Code de commerce, le délit de banqueroute est puni de cinq ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende. Toutefois, si l’auteur ou le complice de banqueroute est un dirigeant ou un prestataire d’investissement, les peines sont portées à 7 ans d’emprisonnement et 100.000 euros d’amende.
A titre de peine complémentaire, les personnes physiques coupables de banqueroute encourent aussi l’interdiction des droits civiques et de famille, l’interdiction d’exercer certaines professions en lien avec celle dans le cadre duquel l’infraction a été commise, l’interdiction pour la même période d’émettre des chèques l’exclusion des marchés publics pendant maximum 5 ans ….
Néanmoins, il convient de préciser que par l’arrêt CE 31 oct. 2017, n° 410496, le Conseil d’Etat a jugé que la seule condamnation pour banqueroute ne constituait pas un motif valable d’exclusion d’un opérateur économique d’une procédure de passation de marché public.
Selon le cas, la juridiction répressive pourra également prononcer contre la personne physique coupable de banqueroute, la faillite personnelle ou l’interdiction de gérer pour une durée qui ne peut dépasser 15 ans à moins qu’une juridiction civile ou commerciale ait déjà prononcé une telle mesure par une décision définitive prise à l’occasion des mêmes faits (C. com.art. L. 654-6).
Lorsque le coupable est une personne morale, le montant de l’amende pour les personnes physiques, est porté au quintuple (art. L.654-7 C.com renvoi art.131-38 C. pénal).
Il est important de noter que depuis un arrêt de la chambre criminelle du 7 avril 1998 (Crim. 7 avr. 1998), la tentative de banqueroute n’est pas punissable. L’infraction doit donc avoir été entièrement consommée.
Les délits voisins
Enfin, à ne pas oublier que des délits voisins à la banqueroute sont également répréhensibles. Il s’agit notamment :
- Le fait de consentir pendant la période d’observation, une hypothèque, un gage ou un nantissement ou d’effectuer un acte de disposition sans l’autorisation du juge-commissaire ou encore de payer une dette en violation de l’interdiction des paiements ou des modalités de règlement du passif prévues au plan (C. com., art. L. 654-8) ;
- la dissimulation ou le détournement de tout ou partie des biens du débiteur, leur recel (C. com., art. L. 654-9, L. 654-10 et L. 654-14), ainsi que l’acquisition de ces biens par une personne ayant participé à la procédure (C. com., art. L. 654-12) ;
- Enfin, la violation par le débiteur de l’interdiction de gérer prononcée à son encontre (C. com., art. L. 654-15).